La République Démocratique du Congo (RDC) dépense chaque année la vertigineuse somme de 4 milliards de dollars pour le charbon de bois, ou makala, selon Fabrice Lusinde, directeur général de la Société nationale d’électricité (SNEL). Ce chiffre choquant a été révélé lors du panel « Déficit énergétique : et si les miniers apportaient la lumière ? » pendant la 10ᵉ édition du Forum Makutano à Kinshasa.
La situation énergétique en RDC est préoccupante. Le makala, qui représente à lui seul 67 % du marché énergétique national, est devenu un véritable pilier économique. En effet, dans un pays où le bois-énergie constitue jusqu’à 94 % du mix énergétique, cette dépendance au makala ne se limite pas à un simple choix énergétique ; elle engendre également des désastres environnementaux. La déforestation galopante qu’elle provoque contribue à l’accélération du réchauffement climatique et menace des écosystèmes uniques.
Fabrice Lusinde n’a pas hésité à tirer la sonnette d’alarme : « Nous avons le devoir de réduire cette dépendance ». Il a souligné que même un transfert modeste vers l’électricité pourrait amorcer une transition significative. Les expériences pilotes menées par la SNEL dans des zones électrifiées montrent des résultats encourageants : lorsque les ménages ont accès à des solutions énergétiques abordables et fiables, leur consommation de makala diminue nettement.
Cette domination du makala cache pourtant une opportunité inédite. La RDC affiche une demande énergétique annuelle de 6 milliards de dollars, dont seulement 1,2 milliard est consacré à l’électricité. Cela représente un marché colossal que la SNEL et d’autres acteurs du secteur peuvent encore conquérir. Les entreprises minières, évoquées lors du panel, pourraient jouer un rôle clé en investissant dans des infrastructures durables pour électrifier les zones rurales et ainsi réduire la pression sur les forêts.
Cependant, cette transition ne sera pas sans défis. Le faible taux d’accès à l’électricité, les infrastructures vétustes et l’absence de politiques incitatives freinent l’adoption des énergies modernes. Mais une chose est certaine : le makala ne peut continuer à être la colonne vertébrale énergétique d’un pays aux ambitions climatiques et économiques élevées.
La RDC se trouve à un tournant décisif : doit-elle poursuivre sur la voie du charbon de bois et ses conséquences dévastatrices ou embrasser une transition énergétique durable ? La réponse à cette question pourrait bien définir l’avenir énergétique et écologique du géant africain, longtemps endormi par la dictature du makala, comme le souligne souvent l’économiste en chef au sein de Al Legacy, Al Kitenge.
S. Tenplar NGWADI